Il y a quelques semaines, la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé la fermeture de son bureau en Côte d’Ivoire, une décision qui suscite des réactions contrastées au sein de la société civile et des acteurs politiques du pays. Si cette mesure marque la fin d’une présence physique de la CPI à Abidjan, elle n’implique pas pour autant l’abandon des enquêtes en cours sur la crise post-électorale de 2010-2011.
La fermeture du bureau CPI : Quelles implications ?
La fermeture du bureau a d’abord provoqué des inquiétudes, notamment parmi les défenseurs des droits humains. Ils redoutent un recul dans les efforts pour rendre justice aux victimes des violences post-électorales qui ont secoué la Côte d’Ivoire entre décembre 2010 et avril 2011. Cependant, Mandiaye Niang, procureur adjoint de la CPI, a rassuré que l’enquête se poursuivra sans relâche. Il a précisé que la fermeture du bureau n’était qu’un ajustement logistique et ne signifiait en aucun cas un abandon des investigations.
Enquête en cours : Les nouveaux axes d’investigation
L’enquête en cours vise principalement à examiner la responsabilité du second camp impliqué dans la crise post-électorale, celui qui a soutenu Alassane Ouattara, après que Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé aient été acquittés des charges de crimes contre l’humanité par la CPI en 2021. Guillaume Soro, ancien chef de la rébellion qui a soutenu Ouattara durant la crise et ensuite devenu Premier ministre et président de l’Assemblée nationale, est l’une des personnalités clés visées par l’enquête.
Collaboration et défis
Mandiaye Niang a souligné l’importance de la coopération des États concernés pour mener à bien les enquêtes de la CPI. En l’absence de cette coopération, les enquêtes peuvent être entravées. Il a rappelé que dans le cas des enquêtes impliquant Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, la Côte d’Ivoire avait montré un haut niveau de collaboration, facilitant l’avancement des procédures.
Le parcours judiciaire de Gbagbo et Blé Goudé
Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé sont, jusqu’à présent, les seuls à avoir été jugés par la CPI pour les événements violents survenus à Abidjan pendant la crise. Après un procès de dix ans, ils ont été acquittés en 2019 des accusations de crimes contre l’humanité, notamment de meurtres, viols et persécutions. Leurs partisans soulignent que cet acquittement pose des questions cruciales sur l’identité des véritables auteurs des crimes documentés durant cette période. Leurs acquittements ont soulevé des interrogations parmi les Ivoiriens : si ce ne sont pas Gbagbo et Blé Goudé, alors qui est responsable des massacres et violences observés à Abobo, Yopougon et d’autres localités du pays ?
Perspectives d’avenir
La CPI poursuit donc ses enquêtes pour déterminer les responsabilités dans les violences attribuées au camp d’Alassane Ouattara. Cependant, la capacité de la CPI à avancer dépendra largement de la coopération locale et de l’engagement de l’État ivoirien à livrer les éléments nécessaires pour permettre la progression de ces investigations. Le soutien de la société civile et la pression internationale joueront aussi un rôle déterminant pour faire éclater la vérité sur ces crimes qui continuent de hanter la mémoire collective ivoirienne.
En conclusion, la fermeture du bureau de la CPI en Côte d’Ivoire ne signifie pas la fin de la quête de justice pour les victimes de la crise de 2010-2011. Les enquêtes se poursuivent, et l’avenir des investigations dépendra des collaborations stratégiques entre la Cour, les États concernés, et les acteurs locaux. La question de la justice pour tous les camps impliqués reste une priorité pour la CPI, afin d’apporter une réponse équitable aux souffrances des victimes.
Gnohou Maxime Keller
